Parmi les rares lacs de lave présents sur la planète, le Nyiragongo (RDC), l’Erta Ale (Ethiopie), le Kilauea (Hawaii) et l’Erebus (Antarctique), ce dernier occupe une place spéciale.
Son magma phonolitique est plus de 100 fois plus visqueux que le magma basaltique du Kilauea ou de l’Erta Ale.
Ce lac de lave, actif depuis les années 70, a été analysé par les volcanologues depuis plus de 40 ans. Au cours des premières décades, les scientifiques ne disposaient que de quelques semaines en été pour engranger des mesures et observations précieuses. L’installation d’équipements permanents ont permis un monitoring durant toute l’année.
Le souffle du dragon endormi :
Ce monitoring permanent a permis de découvrir la régularité des " respirations de l’Erebus ".
Il y a quelques années, Oppenheimer, un volcanologue de l’Université de Cambridge, a mesuré le panache de gaz toujours présent du volcan : la quantité totale de gaz, composés pratiquement à égalité de dioxyde de carbone et d’eau, additionnés d’un peu de dioxyde de soufre et d’HCl, suit un cycle de 10 minutes, avec des variations quantitatives et qualitatives.
L’analyse de plusieurs centaines de milliers d’images a permis d’en déduire les vecteurs de mouvements de surface, et la vitesse moyenne de surface du lac de lave. Depuis 2004, et bien que la surface apparente du lac de lave ait diminuée d’un facteur 4, son comportement pulsatile est demeuré constant, montrant des cycles de vitesse de surface variant entre 5 et 18 minutes. La vitesse moyenne en surface est de 3 à 20 cm/sec.
De plus, il est remarqué que la surface du lac monte et baisse de 2 à 3 mètres, en concert avec le cycle de gaz d’une dizaine de minutes.
Eructations et plomberie du volcan :
Une différenciation entre cette " respiration " et les " éructations " du volcan lors des éruptions permet une meilleure compréhension du système de plomberie de l’Erebus. Lors des éruptions, de grosses bulles de gaz émergent et éclatent dans le lac de lave, faisant des éclaboussures sur les pentes … certaines bombes de lave pouvant atteindre la taille d’un bus. Ces deux comportements ne sont pas couplés, et les scientifiques pensent que les bulles de gaz à l’origine de la projection des bombes proviennent d’une profondeur plus grande. Ils ont en effet noté que les cycles de gaz continuent même lorsque des éruptions font brutalement baisser le niveau du lac de lave.
Erebus - Clive Oppenheimer près d'une grosse bombe d'anorthoclase phonolite - décembre 2013 - photo MEVO
Sources :
- Live Science - Antarctic lava lake huffs and puffs like a sleeping dragon - link
- ScienceDirect / Earth and Planetary Science Letters - Decadal persistence of cycles in lava lake motion at Erebus volcano, Antarctica by Nial Peters ,CliveOppenheimer, Philip Kyle, Nick Kingsbury / 03.2014
- MEVO - Mount Erebus Volcano Observatory - link
- Mantle to surface degassing of alkalic magmas at Erebus volcano, Antarctica - By Clive Oppenheimer & al. - link