Eruption en parapluie d'un volcan de soufre, Pelé, photographiée en 1979 par Voyager - doc. Nasa /JPL.
Io, lune de Jupiter, est le corps céleste le plus actif volcanologiquement parlant de notre système solaire.
Récemment, une équipe de chercheurs, menée par Krishan Khurana – UCLA – a repris les données enregistrées par la sonde Galiléo (1989-2003) - doc. Nasa / JPL -
au cours de ses survols de Io datant de 10 ans , plus particulièrement les données fournies par le magnétomètre embarqué. La réponse du champ magnétique en rotation de Jupiter induite
dans Io suggère un réservoir magmatique électriquement conducteur sous la croûte : cette couche de magma sous la surface d’Io doit avoir une épaisseur de 50 km. et sa température jusqu'à
1.600 kelvin, soit 1.327°C.
Le magma conducteur du manteau d'Io modifie les lignes de champ magnétique
(en bleu)
Doc. Nasa/ JPL / univ. Michigan /UCLA
Bien que d’une taille modeste et comparable à notre lune, soit trop petite pour contenir de grandes quantités d’éléments radioactifs et pour avoir garder la chaleur datant du processus d’accrétion responsable de sa formation, Io est cependant couverte uniformément de volcans.
Le volcanisme sur Io produit trois principaux types d'éruptions :
- Pouvant provenir d'une fosse volcanique (appelée patera), certaines coulées de lave, basaltiques, courent sur des dizaines et parfois même des centaines de kilomètres. Elles sont similaires aux laves terrestres issues des volcans boucliers.
Io - Tvashtar patera -
02.2000 sonde Galiléo - doc. Nasa / JPL
- Les éruptions du second type sont formés de silicates ultramafiques aux températures particulièrement élevées, jusqu'à 1 600 K (1 327 °C).
- Les éruptions du troisième type propulsent jusqu'à 500 kilomètres des composés de soufre, de dioxyde de soufre et de matières pyroclastiques. Ces éjectas produisent de gigantesques panaches volcaniques en forme de parapluie. Ils
fournissent le matériau qui colore les terrains environnants de rouge, de noir et de blanc, et forme une atmosphère de surface éparse. - doc. Nasa
/JPL
Cette activité est en fait le résultat des forces de marées dues à la proximité de la planète géante et du satellite le plus proche. Ces marées engendrent d’importantes compressions et dilatations du manteau et un échauffement par friction interne.
Document illustrant les marées, mais antérieur au sujet d'aujourd'hui ( d'où attribution
erronée d'une couche de soufre liquide sous la croûte).
Une telle activité laisse penser que le manteau de Io pourrait être fondu. Dans ce cas, étant donné l'énergie relarguée, la
pellicule de surface n'atteindrait, selon les calculs des scientifiques, que 2 km. d'épaisseur. Pourtant le relief de Io comporte des variations d’altitude de plusieurs kilomètres que ne pourrait
soutenir une lithosphère aussi fine. Une solution à ce paradoxe pourrait être donner par le volcanisme fonctionnant comme un véritable radiateur, amenant suffisamment de matière en fusion en
surface pour préserver des températures assez basses dans le manteau, et autoriser une lithosphère de plus de 100 km. d'épaisseur.
Les données fournies par le magnétomètre de Galileo montrent une composante anormale dans le champ magnétique conjoint de
Jupiter et de Io en interaction. Les chercheurs viennent de comprendre son origine en supposant qu’il existe des courants électriques internes aux couches de roches fondues à l’intérieur de
Io. L'intérieur de Io - doc. Nasa /JPL
Les progrès de la modélisation du manteau de la lune de Jupiter ont en effet permis de déduire du champ magnétique qu’il devait se trouver, à une distance entre 30 et 50 kilomètres sous la
surface de Io, un océan de magma global dont l’épaisseur doit être de 50 kilomètres. "Ce magma chaud de l'océan interne d'Io serait des millions de
fois meilleur conducteur électrique que les roches trouvées à la surface de la terre" , d'après K. Kuhrana, auteur de l'étude.
Un tel océan proviendrait de la fonte d’une roche connue sur Terre sous le nom de lherzolite, faisant partie des péridotites, et riche en magnésium et fer. Fondue, la lherzolite donne effectivement un magma conducteur.
Animation montrant le survol (124) de Io par Galiléo, en 1999 - doc. Nasa / YouTube :
Animation mixed with actual images from Galileo's October 11, 1999 flyby of Jupiter volcanic moon Io (also known as I24). Animation created in Celestia. Music by _Ghost (available underCreative Commons Non-commercial Sampling Plus 1.0 licence).
Vue des éruptions sur le satellite Io durant une éclipse - les spots brillants indiquent la localisation des évents
volcaniques actifs; le plus brillant, le patera Pillan, aurait des laves de température comprise entre 1700 et 2000 kelvin (entre 1400 et 1700 °C) .
Les laves les plus chaudes sur terre ont une température de l'ordre de 1500 kelvin (1200 °C) ... mais des laves plus chaudes caractérisent les éruptions datées de milliards d'années.
Doc. JPL - Jet Propulsion Laboratory.
L'image ci-dessus fait dire qu'il serait possible que dans les premiers
âges de la terre, de tels océans de magma existaient sous sa surface ... et qu'ils ont disparus depuis longtemps. L'analyse de l'activité d'autres planètes du système solaire permettra-t-il de
comprendre la formation de la nôtre ?
Superbe photo de la mystérieuse et volcanique Io - doc. Nasa /
JPL
Sources :
- Magazine Science - evidence of a global magma ocean in Io's interior. - 12.05.2011
- Nasa et Jet propulsion laboratory
- Science Daily - Nasa's Galileo reveals magma ocean beneath surface of Jupiter's moon. - 12.05.2011.
- Jet Propulsion Laboratory - Galileo's legacy at Jupiter.